Maria-Carmen Perlingeiro

Complicité et volupté

« L’exposition de Maria-Carmen Perlingeiro (…) présente des œuvres inédites et existantes, et constitue un panorama à la fois dense et précis du travail prolifique que l’artiste mène intensément depuis de nombreuses années dans le champ de la sculpture. Dans une cohérence constante et une rigueur absolue, l’artiste brésilienne poursuit intuitivement et méthodiquement son travail à Genève depuis plus de vingt ans. (…) »
«L’artiste privilégie les matériaux naturels tels que l’albâtre, le sélénite ou encore l’or, d’une éclatante beauté et des gestes maîtrisés d’une rare et pure élégance. Certaines œuvres nous renvoient aux origines et aux mondes souterrains, comme si elles paraissaient difficiles à dater. Le choix de matériaux bruts et précieux, et de certaines formes génériques et archétypales, accompagne et soutient ce double désir d’inscrire l’apparition de l’art et la naissance des formes dans la durée, et de les situer, comme hors du temps, dans une tension vers l’« horizon » de l’absolu».
« Maria-Carmen Perlingeiro relève le défi particulier de savoir conjuguer une habileté remarquable et une cohérence substantielle, une densité matérielle et une ténuité suggestive, une volupté affirmée et une complicité manifeste. A première vue, le territoire de Maria-Carmen Perlingeiro semble pouvoir être appréhendé d’un seul regard. De plus près, de nombreux écarts et fissures mis à jour nous laissent percevoir à maints égards la dimension plurielle et équivoque de son travail. Chaque œuvre peut apparaître, briller de tous ses feux, se soustraire à nouveau, et progressivement nous illuminer un peu. Entre minimalisme formel et suggestions figuratives, plénitude et ouverture, brutalité et préciosité, fraction et union, clair et obscur, les œuvres se présentent parfois comme de véritables oxymores visuels. Avant tout, elles s’offrent comme de multiples invitations à voyager au cœur des communions visuelles et sémantiques créées par l’artiste qui parvient tout autant à nous faire sourire que penser et rêver ».
« Dans son travail en général (…), Maria-Carmen Perlingeiro favorise une échelle à taille humaine qui offre non seulement à l’artiste la possibilité de faire corps avec la matière lorsqu’elle la travaille mais appelle également une proximité et une familiarité certaines avec les œuvres. Pour la plupart de petit format, entre distance et proximité, elles paraissent en définitive, caresser ce qui, à la fois, nous excède infiniment et nous exalte intensément ».

Lionnel Gras

« J’ai travaillé pendant dix ans avec du marbre. J’ai connu l’albâtre à New York et j’ai trouvé que c’était une pierre très belle. Mais je ne voulais pas que la pierre soit l’attraction du travail – raconte-t-elle. Techniquement, j’ai été autodidacte, c’est pour ça que je n’ai pas fait d’exposition pendant longtemps. J’utilisais le même marbre que Sérgio Camargo. Un marbre blanc, sans veines, qui vient de Massa, à côté de Carrara, en Italie. Je suis allée en Toscane et j’ai découvert une ville étrusque qui faisait des urnes funéraires en albâtre – Volterra. C’est ainsi que mon travail est redevenu “figuratif”. »

... Les analogies entre l’oeuvre de Maria-Carmen Perlingeiro et celle de Brancusi sont surprenantes et profondes. Elles portent sur l’espace de la création : l’atelier couvert de poussière blanche et rythmé par les rapports des sculptures placées d’après un ordre spatial strict. Elles concernent l’importance de l’éros de la simplicité absolue, si difficile à réaliser, des formes. Elles renvoient, enfin, à cette extériorité essentielle des espaces ouverts, parfois « verts », parfois antiurbains, représentant l’autre du geste concentré, unificateur...

Michael Jakob